Un avantage fiscal en péril ?

Un paragraphe de la page 142 du rapport de la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise suscite une vive inquiétude chez les propriétaires de microbrasseries.

Sans tambour ni trompette, la commission présidée par le professeur Luc Godbout de l’Université de Sherbrooke a recommandé l’abolition de la réduction de la taxe spécifique applicable à la bière produite par les microbrasseries.

La commission Godbout a calculé que l’abandon de la mesure, qui a bénéficié à 101 entreprises en 2011, entraînerait des économies annuelles de 16 millions pour le gouvernement.

Mais pour bien des microbrasseries, la réduction de la taxe permet d’atteindre la rentabilité. « Sans ça, on couvrirait à peine le service de la dette », affirme Isaac Tremblay du Trou du diable.

« Il n’y a personne qui se lance là-dedans pour devenir riche, renchérit Frédérick Tremblay de la MicroBrasserie Charlevoix. On ne rêve pas d’acheter une équipe de hockey ! »

Les Brasseurs du Nord, qui viennent d’investir 6 millions pour agrandir leurs installations, prévoyaient injecter de 3 à 4 millions de plus l’an prochain. L’entreprise a toutefois mis le projet en veilleuse en raison de l’incertitude qui plane.

« Bien des microbrasseries n’auraient pas vu le jour sans la réduction de taxe. »

— Jacques Sirois, PDG des Brasseurs du Nord

Le gouvernement n’a pas encore décidé ce qu’il ferait de la recommandation de la commission Godbout. Des parlementaires se pencheront sur la question le mois prochain et l’Association des microbrasseries compte bien se faire entendre.

Avant de trancher, le gouvernement du Québec devra considérer ses propres intérêts dans le dossier : ces dernières années, Investissement Québec a financé une trentaine de microbrasseries.

Les arguments de la commission Godbout

Le rapport Godbout soutient que la réduction de la taxe spécifique sur la bière « est contraire au principe de neutralité et donne un avantage à des petits producteurs dans un domaine particulier par rapport à d’autres petits producteurs dans d’autres secteurs d’activité ». Il note en outre que la taxe « a été mise en place pour tenir compte des externalités (conséquences) négatives que peut engendrer la consommation d’alcool, externalités qui existent autant pour les petits producteurs que pour les grands ».

Instaurée au début des années 2000, la réduction s’élève à 67 % de la taxe spécifique pour les premiers 7,5 millions de litres produits et à 33 % pour les 7,5 millions de litres suivants. À l’exception des Brasseurs du Nord et des Brasseurs RJ, les microbrasseries québécoises produisent moins de 7,5 millions de litres par année. Avant réduction, la taxe spécifique est de 63 cents le litre de bière.

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